LE CASSE-TÊTE DES RETRAITES

Dans l’opus de Steve KEEN, L'imposture économique, j'ai trouvé un truc pas mal : le détecteur de foutaises (en australien ou en américain, c'est plutôt "détecteur de bouses de taureau" bullshit) qui réunirait quelques joyeux drilles chercheurs scientifiques. À l’analyse, le détecteur de foutaises s’est trouvé un peu juste dans le cas du système de retraites en France : le gros de la difficulté repose sur l’inégalité de la redistribution, donc (1) sur une gestion inadaptée de la réalité d’un système ingérable, (2) mais dans lequel l’importante marge d’adaptation réside dans le système lui-même. L’idée, des chercheurs d’IBM, selon laquelle la prédiction basée sur la corrélation est suffisante, et qu’une compréhension profonde de la causalité est, à la fois, inaccessible et inutile (Martin FORD L’avènement des machines) semble adaptée à l’analyse du système retraite, mais le big data sur le sujet soit n’existe pas, soit est inaccessible. En pratique le poids de l’inégalité réduit au futile les autres variables du système : reste l’analyse à partir des résultats réels connus.

 

 

1/         INTRODUCTION

Lorsque les gens de ma génération : 1937, entendent annoncer la catastrophe certaine du système de retraite alors qu’ils furent témoins et acteurs d’une multiplication par 4 du PIB par habitant et du PIB national par 6,8 (1949/2013), cela les abasourdit ; ils se posent des questions sur la compétence comptable et gestionnaire de notre élite dirigeante ; mais surtout sur la logique présidant aux décisions politiques de nos élus.

Ma génération n’a pas eu d’enfance pour cause de guerre ; elle a vécu pourtant un grand moment d’humanité : le compromis du Conseil National de Résistance. Il n’était pas facile, en 1947, de réaliser un système de retraite par répartition généralisé ; c’est-à-dire, de réduire le revenu alors faible des salariés afin d’assurer un revenu décent à ceux qui sortaient du travail. Cette mise en place devait produire ce qu’il est convenu d’appeler les « trente glorieuses » ; notre génération est effarée que la répartition difficile, acceptée par nos parents, soit devenue impossible au moment où le PIB par habitant en France devenait un des plus élevés du monde et l’efficacité de l’économie française presque sûrement la première du monde parmi les pays développés.

Un retraité, comme un chômeur, ne devient pas, du jour au lendemain, une charge pour les comptes de la nation : les richesses qu’ils persistent à créer passent, bien sûr, de la valeur ajoutée brute des entreprises à celle des ménages et rétablissent un tantinet le déséquilibre entre l’économie de rez-de-chaussée, robuste fondement de l’économie réelle, et l’économie du premier étage. En général, les individus paient eux-mêmes le prix fort de leur perte d’efficacité économique ; ceux qui disposent de stocks de régulation suffisants (épargne de précaution, patrimoine immobilier ou mobilier, jardin) contribuent même à l’amélioration de la productivité globale du pays. 

2/         UNE POLITIQUE AUX OBJECTIFS ÉTONNANTS ET RÉSULTATS BIZARRES

Le système des retraites en France présente trois singularités étonnantes : (1) selon les régimes, les taux de cotisation de base varient de 37,20% pour EDF à 10,03% pour les exploitants agricoles[1] : ce qui dit que les inégalités de cotisation sont incomparablement supérieures au suivi par le taux de cotisation, année par année, de la durée d’espérance de vie à 60 ans ; (2) le niveau de vie des ménages des retraités est, à peu de chose près, le même que celui des actifs (98%) : ce qui dit fortement que la retraite reproduit la hiérarchie acquise en activité, voire l’aggrave à l’exception du premier décile de ménages de retraités ; (3) la part individuelle du PIB consacrée aux retraites n’augmente pas à la même allure que le PIB par habitant ; en comparant la distribution des retraites individuelles avec le PIB par habitant, nous trouvons 12,8% du PIB/h pour le 1er décile et 120,8% pour le 10ème décile ; ce qui dit, à peu près, que les analyses du système de retraite, telles celles du COR ou de l’Observatoire des Retraites, sous-tendent des logiques, peut-être brillantes et complexes, mais assurément fondamentalement erronées, voire suspectes. (4) Un des résultats les plus bizarres du système retraite est qu'il aboutit à une dispersion réelle de l'ordre de 9,4 pour le régime général, alors que la dispersion « théorique » est de l'ordre de 2 ; chemin faisant, cette dispersion passe de pratiquement égalitaire à une réalité super inégalitaire, voire à une iniquité insupportable.

Logiques difficiles à découvrir sans connaître les données au jour le jour (diachroniques) des comptes de retraites. Le système actuel de retraites, parti d’une intention redistributrice correctement mise en forme, pratique maintenant une redistribution négative, aggravée par chaque réforme depuis 1993 ; c’est-à-dire, qu’un euro de cotisation de l’actif  du premier décile ouvre moins de droits à pension que l’euro de cotisation du dernier décile : il est douteux, compte tenu du poids de ces pensions, que le cas des retraites des exploitants agricoles modifie vraiment cette situation ; pour mémoire le système de retraite des exploitants agricoles est celui où l’euro de cotisation rapporte le plus d’euros de prestation.

Il existe cependant un indice à partir des données synchroniques. Après le découplage du montant des retraites d’avec celui des salaires, puis celui du découplage de plus en plus aggravé de l’âge de la retraite d’avec la durée d’activité réelle, nous constatons deux évolutions : (1) pour chaque décile : le revenu des ménages de retraités est assez proche du revenu des ménages d’actifs : ils ont tendance à se rapprocher ; (2) le différentiel entre déciles a tendance à se réduire jusqu’à la médiane, puis d’augmenter de manière exponentielle au-dessus : je ne connais pas la borne supérieure du 10ème décile, mais la tendance donne une augmentation du volume de pensions partagés de l’ordre de + 45% par rapport au 9ème décile ; (3) la répartition d’une somme par décile peut aller de 10% par décile (égalitaire) à proche de 0% aux 9 premiers déciles et 100% au dernier décile (léonine) : c’est la tendance à long terme de la répartition de la valeur ajoutée brute par la nation en France ; mais aussi, plus ou moins rapidement, dans toutes les économies développées. Je n’ai pas trouvé de statistique sur la répartition des retraites, à l’exception d’une répartition par tranche de 100 € mensuel émanant de la CNAV (80% des pensionnées) qui demande des calculs fastidieux pour être répartie en décile ; mais seulement sur la répartition des revenus des ménages dont la personne de référence est retraitée. La réglementation pour les salariés agricoles est identique à celle des salariés du régime général ; il représente 13% des pensionnés, mais ont, en moyenne, des durées de carrière beaucoup plus courtes dans ce régime. Pour les complémentaires, elles représentent environ 25% de la masse des pensions, mais ne s’appliquent qu’aux régimes du type régime général ; leur poids, dans les régimes de fonctionnaires, ne dépasse pas 0,5%. Comme, en pratique, les retraites complémentaires rendent comparables les retraites du régime général à celles des fonctionnaires, il existe peu de risques de falsifier la réalité en appliquant une majoration de 25% à la distribution par tranche mensuelle d’une centaine d’euros de la CNAV.

La durée moyenne de vie en emploi en 2010 est de 34,2 ans (pour 34,5 pour l’ensemble de l’UE) : l’augmentation de la durée de cotisation représente donc une volonté politique irréelle dont l’objectif  implicite est (1) la baisse du montant des retraites ; (2) de la population la moins employée, d’abord féminine. Si nous tenons compte du fait que la répartition actuelle du PIB en faveur des ménages de retraités reproduit et aggrave l’inégalité salariale, voire les inégalités des citoyens devant la loi, comme le montre le résultat effectif des différentes « réformes » des retraites en France. L’amélioration constatée du niveau de vie du premier décile de ménages de retraités porte (1) sur une masse marginale ; (2) est un trompe-l’œil : l’amélioration relative résulte d’abord de l’augmentation du nombre de travailleurs pauvres.

En fouillant la littérature de manière un peu exhaustive, l’objectif énoncé du pouvoir politique serait de maintenir la masse des pensions en dessous de 14% du PIB. Or, au 1er janvier 2017, 25% de la population a 60 ans et plus, 20% a 65 ans et plus. Pour quelles raisons ? Quels justificatifs moraux, économiques, juridiques, techniques autorisent un tel objectif ?

Quant aux résultats, constatons, après cinq réformes gravées dans la loi, qu’elles aboutissent toutes à réduire les faibles pensions, augmenter les fortes et aggraver les inégalités des citoyens devant la loi. Existe une défaillance structurelle dans la maintenance du système retraite. Défaillance d’autant incompréhensible que le mou existant sur la répartition des inégalités est sans commune mesure avec les bricolages des « réformes » passées aux forceps.

3/         UNE METHODOLOGIE INADAPTÉE

Première remarque : le concept d’espérance de vie n’est pas facile à manier, vu l’ensemble de données qu’il synthétise et porte sur une population dont la cohérence n’est pas évidente ; par contre, le nombre de retraités, leur retraite moyenne ou médiane, me semblent de logique facile à comprendre et à suivre.

Deuxième remarque : si les gains d’espérance de vie deviennent une donnée statistique robuste sur le long terme[2], par contre son développement chaque année (taux de décès) paraît, par moment, assez chaotique et plutôt corrélé aux conditions météorologiques instantanées qu’à la médecine ; disons que les variations journalières sont plus importantes, en plus ou en moins, que la variation moyenne. Remarquons seulement la nécessité de raisonner sur l’espérance de vie constatée à 60 ans, si nous voulons contester ou valider la loi qui l’établit à cet âge ; il n’en fut jamais question dans le débat, d’aucune part : pourquoi ? L’âge moyen de décès de la génération 60 ans est 70 ans (INSEE : population au 1er janvier 2017). Sa robustesse ne doit pas faire perdre de vue qu’il s’agit d’une valeur assurantielle, donc que son calcul permet (1) aux assureurs d’évaluer le risque réel ; (2) mais aussi de supputer et justifier le coût de contrats qui, non seulement, annule le risque, mais encore dégage un bénéfice substantiel (Cf les comptes des entreprises financières dans les comptes nationaux).

Troisième remarque : un indicateur émerge, celui des décès prématurés qui correspond aux décès avant 65 ans (NATnon06228) ; ceux qui ne toucheront jamais de retraite ou pratiquement pas. Les décès prématurés « bénéficient » à ceux qui restent, mais (1) surtout à ceux titulaires d’une retraite importante, disons supérieure à la médiane pour être gentil ; (2) ou qui vécurent une vie physiquement facile. Nous pourrions redistribuer égalitairement, voire au seul bénéfice des plus faibles retraites, la part des morts prématurés. L’INSEE comptabilise les décès prématurés depuis 2002 ; en moyenne annuelle, ils s’élèvent à 216 000 ; à comparer à la moyenne annuelle sur la période de l’ensemble des décès : 538 000 ; disons que les décès prématurés représentent 40% des décès en France (ces données ont disparu du corpus statistique : elles ne sont pas cohérentes avec les tables de survie et les taux de décès par tranche d’âges). Certes les tables de survie tiennent compte de cet état de fait afin d’établir et cotisations retraite, et montants des retraites ; mais nous n’avions jamais pris conscience de la grosse part des Français qui ne participaient pas ou plus à la répartition, faute de vie. Pas plus d’ailleurs du fait que la part des prédécédés soit répartie en majorité aux retraités les plus aisés, alors que les décès prématurés surviennent en majorité sur la population ayant eu la vie la plus difficile ; or, il est facile d’établir le montant des droits à la retraite des personnes décédées prématurément ; ainsi que ceux qui décèdent durant leur retraite. (Je n’ai trouvé aucune donnée robuste permettant de valider ou non cette remarque.)

Quatrième remarque : il paraît possible, en comptabilité nationale, d’établir les comptes et en quantité et en valeur des pensionnés qui rentrent ou sortent par décès du système de retraite. Bien que cela soit possible, ce n’est pas fait … du moins, pas diffusé.

Cinquième remarque : l’allongement de l’espérance de vie a lieu, depuis 1898 où nous tenons les statistiques d’état civil, surtout en début de vie : en 1898, 25% des enfants n’atteignaient pas leur cinquième année ; nous en sommes, en 2016, à 0,4%. Il paraît probable que l’espérance de vie à 60 ans peut maintenant varier en moins (comme en 2015) ou en plus en fonction de la météorologie et de la prévalence des maladies chroniques de « civilisation ». Plus généralement, la notion d’espérance de vie perd de la pertinence à mesure qu’elle se réduit. Il y a urgence de collecter les durées réelles de vie et l’évolution journalière par notre appareil statistique.

Sixième remarque : le taux de décès des pensionnés s’aggrave (1) par le vieillissement de cette population ; (2) par la prévalence des maladies chroniques dites « de civilisation » ; (3) par la détérioration de l’environnement, singulièrement, les accidents météorologiques, climatiques, chimiques, épidémiques, etc ...

Septième remarque : Le Conseil d’Orientation des Retraites produit, deux fois par an, des rapports ineptes (dans le sens littéral) parce qu’ils reposent sur des analyses linéaires inadaptées à la complexité dynamique du système ; apparemment, il ne connaît pas les variables structurantes du système : nombre de retraités, valeur des entrées, valeurs des sorties, au jour le jour, qui lui permettrait de comprendre son fonctionnement et d’en donner une représentation correcte. Pour produire des analogies faciles, le COR analyse comme si la Météorologie Nationale travaillait sans connaître les températures instantanées du territoire ; ou comme si nous conduisions une voiture avec un compteur de vitesse fantaisiste.

4/         MES PRÉCONCEPTIONS

Les conclusions d’une recherche reposent sur la confrontation de préconceptions avec des données délivrées par l’appareil statistique ayant une pertinence admise ; d’où l’importance de connaître les préconceptions du chercheur

4.1/      Si nous considérons la quantité de richesses produites par la productivité-volume globale de l’activité ensemble, au regard des besoins de la population, notre pays peut largement, non seulement réduire le temps de travail salarié des actifs, mais aussi permettre un départ très tôt de la vie dite "active" salariale. Les difficultés proviennent majoritairement de la répartition abusive de la valeur ajoutée nationale produite par tous, ensemble.

4.2/      Le salariat est le système le plus efficace trouvé par les hommes afin d’appréhender la valeur créer par les autres ; incomparablement plus efficace que le pillage par la force ou que l’esclavage qui eurent chacun leur heure de gloire. L’actuelle organisation de notre société nationale rend le statut de salarié le plus désirable parmi les possibles.

4.3/      J’estime que notre principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant la loi fait partie des droits individuels garantis les plus précieux de notre histoire. Le PIB par habitant s’élèvent à 31 800 € ; 10% des retraités perçoivent une pension moyenne de 4 000 et quelques euros par an ; 10% des ménages retraités, 1,57 unité, détiennent un niveau de vie de 12 210 € par an : nous vivons dans une réalité d’inégalité hurlante devant la loi.

4.4/      Personne ne démontrera que la productivité globale d’une entreprise provient d’un ou quelques individus ; tout individu est plus ou moins efficace : pas sur tout, pas tout le temps, pas partout ; en plus, il est improbable qu’une entreprise sache utiliser les domaines d’excellence et d’efficacité de chacun de ses membres : le principe de Peter[3] a cours assez automatiquement sur chaque fonction. Ce que nous pouvons constater sur une entreprise devient une vérité statistique forte au niveau d’un pays : chaque individu met dans son activité non salariée le meilleur de ses compétences, de son efficacité, de ses dons.

4.5/      Les « réformes » du système retraite brisèrent le contrat social national de manière à peu près irrécupérable. Personnellement, je dois toucher comme pension effective 75% de ce que m’ouvrent droit aujourd’hui les cotisations versées ; alors que salaires et PIB par habitant continuaient à progresser, donc un important déclassement. La loi Macron sur la confiance paraît avoir aggravé la rupture.

4.6/      Au moment où le concept de revenu universel secoue le débat public, autant à gauche qu’à droite, je trouve aberrant que la manière la plus simple d’y tendre : la réduction des inégalités dans la distribution des prestations sociales, ne soit ni envisagée ni analysée par aucun camp.

4.7       Comment un progrès aussi incontestable que le gain de durée de vie puisse devenir un problème qui mobilise la part la plus cynique des mondes politique et économique me paraît proprement inhumain.  

5/         REPRÉSENTATION FLOUE DU SYSTÈME RETRAITE

Les rapports du COR et les décisions politiques en la matière donne une représentation floue du système national de retraite. Comment, dans ces conditions, les réformes du système n’embrouilleraient-elles et n’aggraveraient-elles pas les choses ?

5.1/      Le 20ème siècle nous a appris quelque chose de définitif sur les modèles mathématiques : ils perdent toute valeur prévisionnelle et capacité d’administration de l’incertitude devant les systèmes dynamiques complexes en déséquilibre. En ce qui concerne le système des retraites, il a déjoué toute prévision depuis, disons, 1983. Les matheux de l’INSEE et du COR ne peuvent en donner une représentation mathématique a minima exacte que sur une toute petite part du passé et sur un point futile ; les censeurs de la Cour des Comptes y perdent leur boussole de l’intérêt public.

5.2/      Les bases politiques des décisions sont largement fausses. (1) Le discours politique récurrent porte sur l’impossibilité logique de servir des retraites correctes à cause de la prolongation de la durée de vie ; or le gros des gains historiques de durée de vie provient de la petite enfance ; puis, dans une moindre mesure, de la baisse des taux de décès entre 15 ans et 58 ans ; à partir de 60 ans, les taux de décès deviennent chaque année de plus en plus supérieur à la moyenne. (2) Incohérence entre la volonté politique de faire travailler les gens plus longtemps et le développement concomitant du chômage de masse. (3) Dénonciation médiatique du régime des fonctionnaires alors qu’il est excédentaire et le moins inégalitaire des régimes : donc, probablement, un régime exemplaire.

5.2/      Les objectifs et résultats réels « intérêt public » ne sont ni clairement énoncés, ni validés, ni justifiés. Quelle est l’analyse « intérêt public » de principe comme (1) allongement de la durée de cotisation, (2) décote/surcote, (3) limitation des droits au partage de la Valeur Ajoutée Brute pour une catégorie de citoyen : les retraités, (4) détérioration des conditions de vie d’une partie de la population, (5) rabotage autoritaire des droits acquis, (6) rupture du contrat social national ? 

6/         UN SYSTÈME DYNAMIQUE COMPLEXE EN DÉSÉQUILIBRE

Personne n’a jamais vu un singe conduire un cheval … ni un statisticien de génie comprendre la mort. L’hypothèse que le système de retraite français constitue un système dynamique complexe en déséquilibre relève du constat. Que les scientifiques le valident ; que les techniciens de la théorie mathématique du chaos en donnent une représentation  claire et robuste permettant la décision politique dans les clous des droits individuels garantis constitutionnels. (1) Peu de variables structurent les systèmes dynamiques complexes en déséquilibre : trois, a minima et pratiquement a maxima ; il s’agit de déterminer leur poids. (2) Un temps caractéristique détermine les variations de flux dans ces systèmes ; nous avons tendance à croire que ce cycle est annuel, mais dans la réalité les variations des sorties du système sont journalières ; un suivi hebdomadaire paraît fonctionnel parce que la semaine est une unité temps à valeur unique et qu’il est toujours possible d’éliminer les semaines anormales de l’analyse. Conséquence : la durée de vie des retraités doit être traitée en jours : jour de décès moins jour de naissance : cette donnée existe sur les certificats de décès. (3) Il n’est pas possible d’administrer un système dynamique complexe en déséquilibre : prétendre fixer la valeur qu’aura une des variables structurantes à un instant t ; par contre, il est possible de contenir dans un espace à trois dimensions ses possibilités de variation ; les mathématiciens de la théorie du chaos appellent ces points de contention « attracteurs » : par exemple, fixer une pension mensuelle minimum et/ou maximum contraignant.

7/         CONCLUSIONS : PROPOSITIONS MÉTHODOLOGIQUES ET ATTRACTEURS

L’absence de données essentielles m’interdit de présenter des conclusions absolument validées sur le système de retraites français. Cependant, l’importance de la dérive inégalitaire du système permet, à très court terme, un redressement financier rapide, sans coût, peu douloureux pour les plus favorisés et améliorant significativement le contrat social national.

Certes, la connaissance des données réelles du système des retraites permettra de définir plus finement les attracteurs et les choix politiques, mais compte tenu du poids dominant de la masse des pensions parmi les variables structurantes du système, nous pouvons prendre des mesures d’urgence à condition de rester dans l’enveloppe de la masse de l’année n-1; c’est-à-dire, sans connaître les variations diachroniques de cette masse. Après simulation, je propose (1) la répartition égalitaire de 44% de la masse ; (2) la fixation à 1 500 € par mois d’un minimum pension ; (3) un pas arithmétique de l’ordre de 150 € par mois entre décile.

En l’état de l’analyse, il existe deux autres variables structurantes du système retraite : (1) la durée de cotisation : une quasi constante en  moyenne, environ 35 ans, mais d’une grande variabilité individuelle ; (2) l’espérance de vie réelle à 60 ans ; rappelons que l’espérance de vie correspond à l’âge où ne survit que moins de 50% d’une génération de l’âge a ; elle ne peut être connue exactement faute de disposer des durées de vie en jour : approximativement 10 ans. Constatons que ces deux variables (1) sont assez contraintes en moyenne ; (2) pèsent relativement peu : qu’il le veuille ou pas le système de retraite met fin à la pension à la date du décès et constate les droits acquis à la date de la mise à la retraite. La connaissance diachronique de ces trois variables permet (1) de comprendre son fonctionnement ; (2) d’en donner une représentation qui réduise l’incertitude et de prendre des décisions politiques améliorant notre contrat social national ; (3) d’en assurer la maintenance annuelle.

De nombreux loups habitent le système de retraite en France ; au final, il aboutit à une distribution des retraites de type Pareto, non seulement structurellement inéquitable, mais encore dont chaque réforme aggrave l’iniquité. Aucun hasard dans un tel processus, il résulte  des pratiques automatiques conduites par le dernier décile : elle comporte la totalité de la classe politique et des décideurs. Une distribution Pareto est fonctionnelle ; c’est dire que ce qu’une fonction produit, une autre fonction peut le corriger.

Apparaissent quelques attracteurs potentiels du système retraite : (1) un minimum légal retraite ; (2) une part égalitaire des retraites ; (3) un taux de cotisation égal pour tous les régimes ; (4)  une durée d’activité réaliste à l’ouverture des droits à retraite complète ; (5) une liquidation unifiée de l’ensemble des droits.

Au terme de cette recherche, j’ai conscience de n’avoir pu valider robustement  l’hypothèse peu à peu dégagée des faits empiriquement constatés par cause d’absence de données diachroniques essentielles. Bien sûr, je suis taraudé par l’idée d’avoir commis quelque part une erreur de raisonnement : mes relecteurs, en général bienveillants, ne l’ont pas détectée. Plus une certitude : le régime exemplaire de retraite à imiter et perfectionner par maintenance assidue, c’est celui des fonctionnaires pour deux raisons : (1) être le plus égalitaire ; (2) avoir le meilleur potentiel d’amélioration de la productivité globale de notre économie nationale. Même équilibrés, méfions-nous des régimes par points : ils reposent sur une logique inégalitaire par principe. (bernard garrigues, ce 20 juin 2018)

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NOTES

1/         Les tables de survie (2014) donnent un taux de survie à 65 ans de l’ordre de 88%. En pratique, au 31 décembre 2013, il existe 11 992 830 français de 65 ans et plus ; soit 18,2% de la population totale et 28,7% de la population active, définition BIT. Remarque étonnante : le volume de la population âgée de 65 ans et plus égale, à peu près, celui de la population active non employée, définition BIT.

2/         Deux processus organisent l’iniquité de la redistribution du système retraite : (1) la part des prédécédés est répartie automatiquement aux survivants en fonction des droits acquis ; (2) le différentiel entre la retraite moyenne et la retraite médiane fait que cette répartition bénéficie aux retraites supérieures à la moyenne au détriment de celles inférieures.

3/         Prendre conscience que, quel que soit le système de redistribution mis en place, s’il n’est pas maintenu en temps réel, il finit rapidement par bénéficier aux plus puissants, toujours. L’écart entre la part du PIB des retraités (14%) et le nombre de retraités (25%) croît ; mais pas au détriment des meilleures pensions.

4/         En pratique, il est impossible de calculer rationnellement la part effective des prédécédés au mathématicien primaire que je suis : le système des retraites est chaotique. Compte tenu des données statistiques dont nous disposons, le taux de 44% de redistribution égalitaire entre ayants-droit devrait rétablir une équité normale.

5/         Il y a 15,2 millions de retraités au 31 décembre 2015 ; ce qui correspond, selon la pyramide des âges 2015, à une moyenne de mise à la retraite de 61 ans 7 mois et signifie que seulement 23% de la population atteint l’âge de la retraite … les tables de survie donnent un taux de survie de l’ordre de 90% à 62 ans pour 100 000 français qui parviendraient à cet âge. Afin d’avoir une représentation approchée au 31 décembre 2015 il convient de calculer ce pourcentage pour chaque tranche d’âge de population donnée à cette date. Mais il y a un hic … la sommation de toutes ces tranches donne une population de 59 millions … le biais provient probablement du solde migratoire dont l’âge des migrants n’est pris en compte qu’au prochain recensement de leur entrée en France : il est de l’ordre de 11,7% … là nous trouvons un âge moyen de mise à la retraite de 59,5 mois qui apparaît cohérent, car les tables de survie sont des constructions mathématiques assurantielle qui, par exemple, ne peuvent tenir compte ni des aléas climatiques, ni de la prévalence des maladies chroniques à une période p ; mais, surestiment le risque pour la raison triviale de la marge bénéficiaire sur les contrats : plus elle surestime l’espérance de vie, plus elle programme un bénéfice potentiel important à court terme  puisque le risque réel se réalise au jour le jour. Cf : comptes financiers du secteur des sociétés financières de l’INSEE.

6/         Afin d’avoir une idée visuelle de la réalité du processus, il faut traduire tous ces pourcentages en masse de prestation et en répartition individuelle. En 2013, le montant des revenus des ménages dont un retraité est la personne de référence représente 295 milliards d’euros, dont 277,8 milliards de masse de prestation retraite, soit si vous acceptez 44% la part des prédécédés une masse 122,2 milliards à répartir égalitairement, donc une revalorisation des petites de retraites d’environ 6 000 € par an en moyenne. Le résultat serait une amélioration des retraites pour les 7 premiers déciles, sans changement pour le 8ème décile, une réduction, faible, pour les 9ème,, importante pour le 10ème décile. Le tout à la louche. Biais : la masse des prestations retraite ne bénéficie pas uniquement aux ménages dont la personne de référence est retraité et résidente en France.

7/         Voir STAT2016.

8/         À partir de mon impossibilité à comprendre le fonctionnement du système de retraite en France, l’impression dominante devant le résultat de la distribution des prestations, de type Pareto, et de son exagération par chaque réforme prend forme l’idée qu’il s’agit d’une organisation mécanique de l’iniquité au détriment de la partie la plus faible de la nation. Je n’ai trouvé nulle trace d’une volonté politique explicitée ; hypothésons que, probablement, l’avidité matérielle sans limites des élus de tous niveaux d’échelle et des élites économiques et administratives constitue le moteur caché de l’iniquité de la répartition. De plus, l’âge, en renforçant le poids relatif des riches parmi les élites, tend à aggraver presque automatiquement le système.  

9/         La distribution actuelle des revenus des ménages de retraités rend compte, certes, (1) des aberrations des rapports de force politique à tel instant t de notre histoire ; mais aussi (2) des « réformes » reposant sur des préconceptions erronées ou de données non validées ; (3) du fait que le salariat est devenu le statut le plus désirable de nos concitoyens, alors qu’il est le moyen le plus efficace de pomper au bénéfice des forts la valeur ajoutée brute que nous avons produite ensemble : la distribution des revenus des ménages de retraités dépend fortement de la distribution des salaires ; (4) du fait que le salariat rend le secteur des ménages assez répulsif, alors qu’il s’agit du secteur économique national le plus productif global et vraiment le seul exploitant efficient  des ressources naturelles locales : il constitue la base robuste de l’économie réelle ; (5) si nous comparons la clef de distribution constatée avec la clef de distribution arithmétique normale (un écart égal entre déciles), nous donnons une représentation nette du résultat abouti au bout de 66 ans d’un système au départ à volonté redistributrice équitable ; (6) elle fait émerger une hypothèse à vérifier : l’activité politique est devenue l’ascenseur social le plus efficace afin d’accéder à l’élite républicaine et aux revenus les plus élevés de notre économie nationale ; en pratique, de devenir un citoyen hors-sol, ignorant la réalité des citoyens moyens et, encore plus, celle des citoyens en difficulté ; (7) la distribution constatée est un résultat : les sorties du système de retraite existent, mais elle ne permet pas de comprendre vraiment comment fonctionne le système : le revenu final des ménages de retraité  comporte d’autres revenus que la retraite ; la distribution des revenus de ménage de retraité porte sur une masse de 295,4 milliards alors que les montants des cotisations (et équivalents) redistribuées atteignent 277,8 milliards.

10/       Le modèle consiste à transformer la distribution constatée par le COR au 31 décembre 2012 par tranche de 100 € mensuel en décile sur une population de 100 000 pensionnés, puis d'effectuer une comparaison avec la distribution par revenus des ménages de retraités de l'INSEE. Il montre que la distribution des revenus est moins dispersée que celle des pensions en introduisant quelques biais : (1) la distribution par tranche de 100 € est celle de la CNAV : elle représente 93% des pensions, si nous y incluons les salariés agricoles ; (2) la distribution par revenu des ménages comporte d'autres revenus que les pensions et la majorité des cas à plusieurs pensions.

 11/      Puis donner la représentation que donne le modèle de la réalité en l’appliquant sur le nombre de pensionnés, la masse des pensions et des revenus.

12/       Il y a incohérence entre la table de survie 2013 et la population par tranche annuelle d’âge 2012 qui ne permet pas de valider l’une par l’autre. Il s’agit d’établir à l’instant t, avec une approximation suffisante, la quantité de prédécédés ; mais c’est la quantité de survivants qui est la plus facile à trouver.  Les survivants théoriques résultent de la sommation, par âge, de toutes les tables de survie précédentes ; donc, en matière de retraite, des tables de survie de 0 à 65 ans. La pyramide des âges d’une année n fournit l’approximation la plus proche de la réalité de la donnée recherchée ; elle tient compte aussi du solde migratoire. Comparer la pyramide des âges de deux années permet d’évaluer la dérive retraite ; donc des calculs simples, certes pas très exacts ; mais dont les erreurs sont, a priori, inférieures à celles (1) des écarts entre régimes de retraite ; (2) des évaluations de populations retraitées ou totales à un moment t (31 décembre de l’année observée).

13/       Il existe un moyen d’avoir une idée des mouvements entrées/sorties du système de retraite : (1) une statistique établit le nombre des décès par mois de janvier 1946 à avril 2017 (IdBank 000436394 et irsocsd2015_T79MDEC.xls) ; des statistiques sur la structure de la population française chaque année (ip1429.xls pour 2013, ip1482.xls pour 2014) : par différence, il permet d’établir le solde par tranche d’âge, dont la grosse majorité sont des décès, donc les sorties du système retraite ; (3) une statistique sur les naissances mensuelles depuis 1946 (irsocsd20151_T79MNAIS.xl) permet d’établir le nombre approché d’entrées dans le système retraite à 60 ans. En pratique, (1) il existe une distribution mensuelle significative des décès de 1 (août) à 1,33 (janvier) ; (2) une distribution significative des naissances assez chaotique (max : 1,44 max/min) en moyenne de 1 (novembre) à 1,09 (mai) : pour l’année 1953, la distribution s’établit entre 1 et 1,17 ; (3) 84,7% des décès ont lieu à l’âge de la retraite : 473 000 sorties en 2013 ; (4) le nombre d’entrées dans le système retraite égale 819 000 (5) le solde entrées/sorties 2013 égalent 346 000.

14/       L’approche des flux entrées/sorties de pensionnés améliore la compréhension du système, mais pas suffisamment afin de le maîtriser. La distribution du montant des pensions est d’une bien plus grande ampleur : (1) la distribution des pensions donne un facteur de 9,44 entre le 1er et le 10ème décile ; (2) la distribution des revenus de ménages de retraité un facteur de 6,83 entre le 1er et le 10ème décile ; (3) les taux de cotisations suivant les régimes constituent une aberration ; or la masse des retraites représente 277,8 milliards : à mon avis, tant que nous ne connaîtrons pas les mouvements financiers diachroniques au pas journalier des pensions, nous ne comprendrons pas comment fonctionne le système.

15        La masse des retraites égale 277,8 milliards en 2012 (tableau 3.19 de doc-3757.xlsx) : un partage égalitaire donne 1 467 € par mois à chacun des retraités. Il existe donc une marge de redistribution plantureuse qui permet de servir des retraites minima supérieures au montant du seuil de pauvreté et même plus.

16        Il est possible de redistribuer plus équitablement la masse des prestations retraite (277,8 milliards en 2012) à partir de trois préconceptions : (1) partage égalitaire de 44% de la masse ; (2) calcul d’une redistribution arithmétique normale au pas de 1 800 € annuels ; (3) pension minimum à 1 500 € mensuels. L’opération n’a rien ni de violent ni de révolutionnaire.

17        L’Australie, qui ne paraît pas un pays marxiste, interdit le cumul d’une pension de retraite avec un revenu annuel autre de 66 000 € (taux de change du jour) ; en local, 100 000 dollars australiens. En France, cela équivaut à une récupération par le système de retraite d’environ 40 milliards de prestations, à la louche … écrivons : beaucoup plus que l’objectif affiché de toutes les réformes du système des retraites.

18        Il ne me paraît pas très difficile (1) d’établir un cadre comptable réglementaire rigoureux et standard pour l’ensemble des caisses de retraite ; (2) de consolider réglementairement leurs comptes de résultat et bilans chaque année ; (3) d’établir un compte retraite pour chaque français ; (4) de suivre, au jour le jour, les gens qui rentrent et sortent du système de retraite avec la valeur de leur retraite : les informations existent, mais ne sont pas mises en forme ou publiées ; (5) connaître, au jour le jour, le nombre de retraités. Il faut sortir de cet embrouillamini dont traite le COR et ne permet pas d’avoir une vision actuelle et future réelle ; et encore moins de prendre des décisions politiques d’intérêt public ad hoc.

19        La consolidation des comptes de l’ensemble des caisses de retraite permet de définir la valeur annuelle en euro d’une unité de compte point retraite et d’affecter à chaque compte individuel un nombre de points en équité avec les cotisations effectives. La France détient une longue expérience des systèmes de retraite par point par l’intermédiaire des retraites complémentaires.  Avoir conscience que le système par point n’a pas d’effet redistributif : il a pour résultat de faire correspondre au plus près le montant des cotisations effectives avec le montant de la pension.

20        Au terme de cette recherche, je me retrouve (1) habité d’un doute intuitif : j’ai commis quelque part une erreur de raisonnement ; (2) complètement pantois devant les analyses du COR : non pas qu’il ne soit composé de conseillers de qualité (cependant, dans ma démarche de chercheur, j’ai eu affaire à un conseiller complètement bloqué idéologiquement et par son appartenance à l’institution), ou de matheux et statisticiens pas à la hauteur (mon niveau mathématique est bac S) mais parce que le résultat des « réformes » du système retraite aboutissent à un constat terrible : elles, toutes, réduisirent les petites retraites et augmentèrent les grosses : il y a quelque chose de pourri au Royaume du Danemark. Pour l’écrire simplement : pour des raisons structurelles, notre organisation nationale produit et aggrave les inégalités, jusqu’à l’iniquité.

21           Définition INSEE. L'espérance de vie à la naissance (ou à l'âge 0) représente la durée de vie moyenne - autrement dit l'âge moyen au décès - d'une génération fictive soumise aux conditions de mortalité de l'année. Elle caractérise la mortalité indépendamment de la structure par âge. C'est un cas particulier de l'espérance de vie à l'âge x. Cette espérance représente le nombre moyen d'années restant à vivre pour une génération fictive d'âge x qui aurait, à chaque âge, la probabilité de décéder observée cette année-là. Autrement dit, c'est le nombre moyen d'années restant à vivre au-delà de cet âge x (ou durée de survie moyenne à l'âge x), dans les conditions de mortalité par âge de l'année considérée.

22           Définition pour le moins ambiguë : l’âge moyen de décès pour un mathématicien primaire veut dire pratiquement que, pour une génération dont l’espérance de vie est 80 ans, à 80 ans, il reste 50% de survivant : ce qui est à vérifier. Si nous analysons la statistique rendant compte de la population au 1er janvier 2017, le point où il y a autant d’habitants plus jeunes que plus vieux est situé entre 41 et 42 ans. Il me paraît incompréhensible de ne pas découvrir dans nos statistiques nationales un état qui décrive le nombre de décédés par jour avec leur âge en jours … les données existent mais ne paraissent pas être assemblées et mises en forme fonctionnelle … Par exemple, au premier janvier 2017, le nombre de natif 1937 (80 ans) égale 54% des natifs 2016 (0 an) ; cela ne permet pas d’en déduire le nombre de prédécédés entre le 1er janvier 1937 et le 1er janvier 2017 car nous ignorons le nombre des individus nés en 1937 entrés dans la population française.

23           Dans nos statistiques nationales, les chiffres relatifs au dernier décile ne sont pas naturellement présentés ; souvent l’écart donné porte entre le 1er et 9ème décile. Or, dans le cas des retraites, la masse du 10ème décile permet, à masse totale constante, de corriger la dérive inéquitable du système. Il existe, dans notre fonctionnement national, un processus robuste d’organisation inégalitaire exponentiel. Christiane TAUBIRA affirme que l’inégalité économique et sociale femme/homme constitue la matrice de toutes les inégalités : le système des retraites confirme cette analyse. Les résultats du fonctionnement du système montrent que les palliatifs mis en place ne suffisent pas, voire ne traitent pas la difficulté.

24        Si nous examinons les travaux du COR, avec une certaine malveillance, des non-écrits apparaissent : (1) l’alignement de tous les régimes sur le régime général, mais dont l’avenir est compromis par ses règles de fonctionnement ; (2) l’alignement des prestations des régimes excédentaires (fonctionnaires, EDF, sur celles du régime général, mais à condition du maintien des cotisations afin d’alimenter les régimes déficitaires ; (3) le rejet des règles de fonctionnement des régimes excédentaires, qu’ils soient de base ou complémentaires, mais qui reposent tous sur une redistribution plus égalitaire des prestations.

25        Ces jours-ci nous avons eu droit, au sujet des retraites, à une déclaration gouvernementale « responsable » : « Pas possible de commettre une réforme systémique en trois mois. » : c’est une avancée. À laquelle, ajoutons : « Pas possible de commettre une réforme systémique à partir une analyse linéaire ; aussi subtile soit-elle. »

26        Peut-être un moyen (approximatif) de valider ou non les tables de survie. Il existe une statistique (irsocs2013) qui donne le taux de mortalité par sexe et groupe d’âge depuis 1937. Elle présente une singularité : le taux de mortalité tous âges est comparable au taux de mortalité, disons, entre 58 et 62. En croisant avec la population au 1er janvier 2017, nous pouvons savoir si le nombre réel de survivants à 60 ans est cohérent avec le nombre des décès enregistrés à l’état civil. La difficulté étant que les décès prennent en compte tous les décès survenus en France alors que les tables de survie sont « basées » sur les naissances en France.

 27       L’analyse des taux de mortalité de 1962 à 2013 (irsocsd2013_t67_fm.fr) fait apparaître que, sur 52 ans, la corrélation est presque parfaite et par année (+0,99 par rapport à 1962) et par tranche d’âges (+0,83 à 0,98 par rapport au taux décès total), alors que le taux de décès total annuel s’est réduit de 30% sur la période : 11,5 à 8 pour mille. Les corrélations sont difficiles à interpréter, mais à ce niveau-là, il me paraît justifié d’affirmer la grande stabilité du processus de mort sur toutes ses dimensions. Je retiens comme quasi constante qu’à 60 ans, 25% de la population survit ; et 20% à 65 ans. Les gains d’espérance de vie apparaissent une variable mineure comparée à l’inégalité de la répartition de la masse monétaire mise en œuvre par le système retraite.

28        À ce stade, nous pouvons émettre l’hypothèse que l’espérance de vie réelle dépend (1) de l’état de santé publique de la population ; (2) de l’état de l’environnement du pays : deux variables à homéostasie robuste, mais très sensibles cependant aux événements catastrophiques, ponctuels dans le temps ou l’espace. Nous vivons une phase de l’histoire de l’homme où beaucoup d’événements catastrophiques proviennent de l’instance politique

29/       Le fichier des décès 2015 (etatcivil2015_dec2015.dbase) fournit les donnés suivantes : décès avant 60 ans 12%, décès avant 65 ans 17% ; il porte sur 593 680 décès : un fichier lourd à manier. Je raisonne sur les % arrondis à l’unité. Les prédécédés d’une année ne permettent pas de prendre en compte la totalité des ceux qui ont cotisé pour la retraite et ne toucheront jamais rien de leurs droits acquis. Cependant, les décédés d’une année donne une base robuste qui permet d’évaluer l’ensemble des prédécédés d’une carrière à partir de la population totale par année et du tableau de répartition des taux décès par tranche d’âge (socsd2013_167_fm.fr.xls) dont la robustesse a été remarquée. Le taux de décès sur la population au 1er janvier 2017 s’élève à 1,4 pour mille de 0 à 59 ans, à 1,9 pour mille de 0 à 64 ans, à 1,5 pour mille de la population entre 15 et 65 classée active, définition BIT ; le taux moyen de décès 2015 atteint 9,2 pour mille. 

30/         L’analyse des taux de mortalité de 1962 à 2013 (irsocsd2013_t67_fm.fr) nous permet de conclure que fichier annuel des décès approche, au pas mensuel, la réalité diachronique du système retraite ; donc de franchir un pas de géant sa compréhension. Corollaire : il suffirait que le fichier annuel des décès enregistre les dates de décès et de naissance, au lieu du mois pour les décès et l’année pour les naissances.

31/       Si nous calculons, suivant les statiques INSEE, les durées de vie en faisant la différence entre année de décès et années de naissance, nous établissons une variable qui peut avoir un différence de 24 mois sur la réalité : (1) 0 cas d’une naissance le 31 décembre pour un décès le 1er janvier ; (2) 24 mois cas d’une naissance au 1er janvier pour un décès le 31 décembre. Il doit être possible de compenser ce biais en établissant une date médiane de naissance et une date médiane de décès par année : à vérifier.

32/       Il n’est pas possible de déterminer exactement la durée de vie statistique « normale » des décédés d’une année n : manque la date naissance et la date de décès. Le chiffre de l’INSEE : différence de l’année de décès à l’année de naissance, donne une valeur médiane en années probablement satisfaisante (83 ans rond), mais pas très rigoureuse en ce qui concerne la gestion des masses  de pensions en cause. Pas satisfaisant de manipuler une médiane représentant 3% des données de travail, disons grossièrement du même ordre de grandeur que la dérive constatée du système : excédent ou déficit.

33/       Les décès de 2015 présentent quelques différences avec la normale : (1) +6,4% sur 2014, +7,8% sur la tendance décennale ; (2) le mois de juin y est le moins mortifère alors que, traditionnellement, c’est le mois d’août ; (3) l’âge moyen des décès : 79,15 y est inférieur à l’espérance de vie. Pour les décès au-dessus de 60 ans, l’âge moyen est de 83,5 ans, l’âge médian de 75,4 ans ; au-dessus de 65 ans, âge moyen 84,8, âge médian 77,8. Les décès 2016 confirment l’évolution ; ceux de 2017 l’amplifient, sous réserves : il s’agit de résultats provisoires.

34/       À 64 ans, le taux de décès par âge dépasse le taux moyen ; l’augmentation tendancielle du taux global des décès consécutif au vieillissement de la population libère un peu plus de droits acquis à la retraite. Relativement négligeable sur la masse des pensions : environ 1 milliard d’euros par an (0,35%).

35/       Il existe, dans le régime général, une pension maximum égale à 50% au plafond de prélèvement sur salaire de la Sécurité Sociale ; soit 1 635 € mensuel en 2017. Or, au 31 décembre 2012, 40% des pensionnés du régime général ont une pension plus élevée que le maximum  et 60% des ménages dont la personne de référence est retraitée ont un revenu supérieur à la pension maximum. Par contre, environ 20% des pensionnés du régime général disposent de droits à pension inférieurs au minimum vieillesse (ASPA) : ce qui devrait donner  un écart de 49% maxi/mini et une dispersion théorique des pensions de l'ordre de 2 entre le premier et le dixième décile. Or, sur les pensions du régime général, la dispersion 2012 est de l'ordre de 9,4 ! Je ne comprends pas cet écart entre la théorie et la pratique. 

36/     Dans le cadre de leurs efforts pour transformer Watson (programme d’intelligence artificielle dont l’objectif est de gagner contre les hommes dans les jeux culturels télévisés) en un instrument pratique, les chercheurs d’IBM ont été confronté à l’un des principes majeur du big data : l’idée selon laquelle la prédiction basée sur la corrélation est suffisante, et qu’une compréhension profonde de la causalité est, à la fois inaccessible et inutile. (Martin FORD L’avènement des machines). Probablement, (1) une telle idée n’est pas parvenue aux ingénieurs du COR, mais de plus (2) le big data sur les retraites demeure inexploré. Une telle idée peut être assimilée à une généralisation de la théorie mathématique du chaos dans la mesure où elle permet de construire des attracteurs du système observé non quantitatifs à caractère politique. De manière empirique, lors de mes recherches géographiques, je suis tombé sur des bifurcations reposant sur l’édiction de lois ; pas sur les termes de la loi, mais sur la manière dont les acteurs s’en saisirent ; par exemple, (1) la loi de 1828 sur les communautés religieuses de filles ou (2) les lois d’orientation agricole de 1960 et 1962.

37/     Taux du PIB. Certes le taux de PIB consacré aux retraites peut être un bon attracteur du système retraite s’il consacre la mise en place d’un suivi (1) à objectif égalitaire, (2) en phase avec la réalité. Au premier janvier 2017, à la louche, 25% de la population est à  la retraite et la masse des pensions tourne autour de 14% du PIB : il paraît « normal », au vu du montant du PIB par habitant (32 300 €) et de la pension moyenne (17 400 €) que la part du PIB consacrée aux pensions valent 72% (taux de remplacement constaté) de 25 %, soit 18% du PIB.

38/     Retraite par points. A priori, le système de retraite par point peut apporter une solution générale  « douce » aux absurdités constatées dans le système actuel : (1) taux de cotisation individuelle variant de 1 à 4 suivant les régimes ; (2) rapport de l’euro de cotisation ; (3) prise en compte de la mobilité entre régimes. Le pays a une longue expérience des systèmes de retraite par points puisqu’ils constituent la base des retraites complémentaires. Encore faudra-t-il (4) que la modèle visé ne soit pas celui du régime général ; (5) que la dispersion constatée ne virent pas à une inégalité encore plus grande des pensions : une maintenance annuelle du système est indispensable ; (6) a priori, une répartition égalitaire de points peut pallier à une dérive inégalitaire structurelle du système de retraite par point.

39/     Reste une difficulté à régler : la sûreté du contrat social pour les citoyens qui souscrivent à un système de retraite ; le fait que les retraités partis à la retraite depuis 1993 voient leur pensions amputées de 25% de pouvoir d’achat, du moins ceux assujettis à la CSG en cours de route, 24 ans plus tard constitue une violence administrative inimaginable. Elle mine la confiance des citoyens dans la classe politique nationale.

40/     L’analyse du système suédois de retraite par points met en évidence la dérive inégalitaire du système sur une trentaine d’années. Probablement que si nous disposions des données afin d’analyser les systèmes de retraite complémentaire français, nous arriverions à la même conclusion.

41/     Le taux minimum de décès (0,84%) en France date de l’année 2007 ; depuis, il augmente tendanciellement (0,92% en 2017). Le taux moyen de décès intervient autour de 54 ans. L’hypothèse est que le taux moyen de décès varie en fonction (1) du vieillissement de la population, mais aussi (2) de la prévalence des maladies de civilisation, mais aussi (3) des conditions météorologiques : le mois de janvier cause 33% de plus de décès que le mois d’août en moyenne sur 73 ans. L’espérance de vie évaluée à partir de 60 ans est un espoir très incertain.

42/     Vu les faibles variabilités à long terme du nombre des décès et du nombres des naissances, nous pourrions imaginer que le nombre de personnes de chaque âge varie du taux de décès autour de la moyenne (-0,9%): pas du tout. En éliminant les aberrations, nous obtenons sur la population au 1er janvier 2018 un taux de variation de l’ordre de 12% entre la plus faible diminution et la plus importante augmentation entre âges consécutifs. 

43/     Non seulement, les gains d’espérance de vie apparaissent une variable mineure comparée à l’iniquité de la répartition de la masse monétaire mise en œuvre par le système retraite ; mais encore, les variations d’espérance de vie sont une variable non pertinente, voire falsifiée, afin d’administrer les systèmes de retraite. (bernard garrigues, ce 22 juin 2018)

 

 

[1]         L’État est son propre assureur : afin de calculer l’équivalent de la charge patronale, il est nécessaire de calculer, année après année, le montant de la participation de l’État aux pensions payées et d’en faire le rapport aux traitements de l’ensemble des fonctionnaires d’État, civils et militaires.

[2]         Théoriquement, lorsque la génération de l’année a s’est éteinte ; plus pratiquement, lorsqu’il ne reste que moins de 10% de survivants.

[3]         Tendance générale à atteindre son plus haut niveau d’incompétence.

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